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Direction Technique Nationale

Un programme d'excellence pour préparer Paris 2024

Projet transversal initié dans le cadre de Paris 2024, le programme BEST vise à optimiser les performances des meilleurs espoirs français grâce à l’utilisation de technologies novatrices.
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Le nom en lui-même en dit déjà beaucoup. BEST, "meilleur" en anglais : un acronyme qui ne laisse pas de doute sur la démarche derrière le projet.

B comme biomécanique, E comme entraînement perceptif, S comme stratégie, T comme transfert de données théorique à des données de terrain…

Cet ambitieux programme a pour objectif d'optimiser la performance du service et du retour de service des joueuses et joueurs de la FFT, valides et fauteuils, sous forme d'une approche systémique, capitalisant des données biomécaniques, cliniques et cognitives.

Projet transversal, il fait partie des programmes prioritaires de recherche (PPR) qui ont été sélectionnés par l’Agence nationale de la recherche (ANR) pour accompagner les athlètes dans leur préparation jusqu’à Paris 2024. Il est d’ailleurs financé sur le Programme d’Investissements d’Avenir lancé par l’Etat et mis en œuvre par l’ANR.

"L’idée de ce projet est de faire le lien entre les sciences du sport et l’entraînement, grâce au traitement automatique de données audiovisuelles qui sont données sous formes de statistiques", résume Cyril Brechbuhl, référent scientifique au Centre National d'Entraînement. La FFT est une des rares fédérations à avoir un projet uniquement pour elle."

Le traitement de données audiovisuelles est riche en informations.
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BEST est réalisé en partenariat avec huit universités et des institutions de haut-niveau. "Il a démarré officiellement en juillet mais ça fait deux ans qu’on travaille dessus, précise Caroline Martin, enseignante à l’université de Rennes et spécialiste de biomécanique appliquée au tennis. Plusieurs phases d’auditions ont eu lieu avant que le projet ne soit retenu. BEST est un projet qui réunit plusieurs acteurs, un consortium de partenaires publics, des universités, des grandes écoles, mais aussi des entreprises, qui ont décidé de se réunir pour optimiser les performances des athlètes."

Services (et retours) gagnants

Mais concrètement, cela donne quoi ? La semaine du 6 décembre dernier, plusieurs joueurs Français entre 15 et 22 ans ont pu expérimenter le projet. Parmi les participants, certains sont entraînés au Pôle France, d’autres sont suivis par la DTN. Hugo Gaston, Sarah Iliev, Arthur Gea, Gabriel Debru, Lucie Nguyen Tan étaient notamment présents. Les joueurs et joueuses ont tapé la balle sur le court technique du CNE, équipé pour l’occasion d’un système de capture de mouvement en 3D permettant d’enregistrer les gestes.

FFT / Cédric Lecoq
Hugo Gaston a fait partie des "cobayes" pour ces tests.
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Une partie du projet a pour objectif de travailler l’optimisation du service d’un point de vue biomécanique, en lien avec les préférences motrices des athlètes. De partir de ce qu’ils sont et de leurs spécificités pour optimiser leur geste. 

"Dans ce premier axe de travail, nous traitons aussi bien de l’optimisation de la performance que de la prévention des blessures", explique Caroline Martin.

Le deuxième axe porte sur l’amélioration de la prise d’informations en retour de service, tandis que le troisième volet consiste en la création d’un logiciel d’outils statistique pour que les entraîneurs puissent analyser les performances de leurs joueurs mais aussi de la concurrence, afin de disposer de datas précises qui dépassent les statistiques classiques (pourcentage de premières et de secondes balles…). Cette plateforme d’optimisation de la performance vient faire le lien entre les données scientifiques des différents axes et le travail sur le terrain entre les entraîneurs.

"Tous les joueurs reçoivent après leur séance des comptes-rendus avec les valeurs mesurées sur la position d’impact ou la vitesse de balle. Cela fait 10 ans qu’on travaille sur ce genre de données. Nous avons une bonne base de données qui nous permet de comparer les joueurs avec des valeurs de références et de donner des pistes de travail. Nous échangeons avec l’entraîneur pour envisager des modalisations gestuelles et comparer les techniques habituelles avec des techniques modifiées selon les préférences motrices de l’athlète."

FFT / Frédéric Stevens
Optimiser le service d'un point de vue biomécanique, l'un des objectifs de "BEST".
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Des résultats "bluffants"

Si BEST ne concerne que le tennis, d’autres projets travaillent sont à l’œuvre dans d’autres fédérations, impliquant scientifiques et athlètes, avec pour objectif d’améliorer le nombre de médailles aux Jeux Olympiques. Car aujourd’hui, pour performer dans un environnement ultra concurrentiel, il s’agit d’utiliser l’ensemble des moyens offerts par les avancées technologiques.

"Cela fait partie de l’évolution de l’accompagnement des athlètes de haut niveau, reprend Caroline Martin. Il y a quelques décennies, les joueurs étaient seuls, puis il y a eu l'entraîneur, puis le préparateur physique, puis le kiné, le préparateur mental... Le domaine de la data est de plus en plus présent dans le sport de haut niveau. Il y a des exemples en tennis et aussi dans d’autres sports d’athlètes qui se structurent avec des statisticiens. Les joueurs vont piocher partout pour s’améliorer et notamment dans les avancées scientifiques afin de bénéficier d’éclairages différents dans la progression du joueur."

Sur le terrain, le projet s’est révélé riche en enseignement pour les participants. Philippe Pech, entraîneur national, supervise les progressions de Igor Mandou Berranger, Clément Kubiak, Tiago Pires et Loan Lestir, un groupe de 4 garçons de 2005 qu’il suit au sein de la DTN avec Benoît Carelli. Trois de ces élèves ont été testés début décembre sur la biomécanique du service et les préférences motrices, qui débouchent sur un profil de personnalité.

"J’ai trouvé ça extrêmement pertinent et surprenant, observe Philippe Pech. En fonction de certaines postures dans le jeu, l’outil détermine des personnalités : un défensif qui se protège, un joueur qui aime prendre l’initiative… On a été bluffé par la corrélation avec ce qu’on constate au quotidien. L’outil donne des formes d’exercice sur la psychomotricité qui aide les joueurs à se renforcer. C’est du très concret : hauteur au service, vitesse... Ça nous conforte sur ce qu'on voyait à l’œil nu mais avec des données précises."

"Les entraîneurs ont participé activement aux séances, confirme Cyril Brechbuhl. Il y a eu un débrief en direct avec des données précises pour déterminer à quel niveau du mouvement on pouvait encore optimiser."

En avril, une nouvelle campagne de test va permettre à certains de faire une comparaison, et à d’autres, qui n’étaient pas disponibles, de tester cet accompagnement scientifique.  Une démarche passionnante et instructive… même si Philippe Pech ne perd pas de vue l’essentiel.

"Il faut faire les choses dans l’ordre. Ces outils qui se développent donnent des indications très intéressantes pour pouvoir améliorer la performance. Mais aussi pertinent soient-ils, ils viennent après l’essentiel : la qualité du travail au quotidien. Encore plus dans le domaine de la formation des jeunes, il ne faut jamais perdre de vue que tout se crée grâce aux efforts sur le terrain."

(Emmanuel Bringuier)
 

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